Bandeau.

Pendant les périodes où le jour disparaissait tôt, les soirées se déroulaient dans la pièce à vivre. Avant le dîner, une partie était réservée à l'exécution des devoirs sous le regard éloigné de Ida, mais avec disponibilité si nécessaire. Une atmosphère calme et paisible régnait en ce lieu. Le silence était de rigueur à l'heure des émissions radiophoniques favorites écoutées par Ida : "La famille Duraton", les informations, la météorologie...
 
Après ceux des repas, venaient d'autres rituels, notamment la lecture de "La Nouvelle République" que le facteur apportait tous les jours. Le journal était déployé, légèrement incliné au dessus de la table. Derrière les lunettes, les yeux parcouraient les articles, en n'omettant pas la nécrologie... Les enfants aimaient ce moment. Ils sortaient leurs petites voitures dinky toys et les déplaçaient en imaginant différents agencements fournis par la situation. Les motifs de la toile cirée qui recouvrait la table figuraient des voies, des bâtiments... L'espace laissé sous le quotidien symbolisait toit ou tunnel...
 
Lorsque la température extérieure était basse, la famille se tournait vers la cheminée où crépitaient les flammes avec ardeur. C'était le moyen d'emmagasiner la chaleur car le reste de la pièce subissait les effets de l'isolation inexistante. Ida réalisait des petits travaux de couture ou de tricot pendant que les enfants cherchaient à déplacer avec adresse les différentes lettres du jeu de pousse-pousse. Avant le coucher et pour augmenter l'effet de chaleur, une tisane de tilleul sucrée au miel et parfois réchauffée avec une goutte de marc de raisin était servie brûlante...